Controverse Huonder : défense de la FSSPX
Depuis deux mois, une meute de chiens déchaînés s’attaque avec virulence à la Fraternité saint Pie X (FSSPX) à propos de ce qu’on peut appeler l’affaire -ou la controverse- Huonder. Et puisque la meute grossit chaque jour de nouveaux membres, la bave aux lèvres, le verbe hargneux et la morsure facile, tandis que la FSSPX ne cherche pas à se défendre, ou du moins trop mollement, je prends l’initiative, moi simple fidèle, de prendre leur défense, sans en avoir l’autorité, ni la légitimité ni même, peut-être, les compétences, mais je m’exprimerai avec mon cœur et les informations dont je dispose. Et puis il faut bien que des voix se lèvent pour assurer une défense qui tarde à arriver. Après tout, les détracteurs de la FSSPX sont-ils plus légitimes ? Ce sont des gens qui s’expriment en leur nom propre, ils ne constituent et ne représentent une quelconque autorité, ils ne font qu’émettre des avis personnels et subjectifs.
De quoi s’agit-il ?
Il y a quatre ans en mai 2019, l’évêque émérite de Coire (Suisse), Mgr Vitus Huonder, membre de l’Eglise moderniste actuelle, dite « conciliaire » (car issue du concile Vatican II) a choisi pour lieu de retraite de se retirer dans une maison de la Fraternité saint Pie X en Allemagne, avec l’accord des autorités de ladite Fraternité. Cette décision, à l’époque suscita déjà un tollé de la part de ceux qui estimaient, à tort ou à raison, que cet événement équivalait à faire entrer le loup dans la bergerie. Nous en étions là, sans incident notable depuis, lorsqu’on apprit incidemment que Mgr Huonder avait célébré une messe chrismale au séminaire de Zaitzkofen de la FSSPX en Allemagne ce Jeudi Saint, 6 avril 2023. Rappelons, pour la bonne forme, que la messe chrismale se célèbre une fois l’an, le Jeudi Saint, exclusivement par un évêque, et qu’au cours de celle-ci, l’évêque consacre le saint Chrême qui servira durant toute l’année liturgique pour l’administration des sacrements de Confirmation et d’Ordre, et bénit les saints huiles qui serviront aux sacrements du Baptême et de l’Extrême-onction. Nouveau tollé cette fois-ci, qui n’en finit pas, qui repose sur le raisonnement suivant : Mgr Huonder ayant été ordonné prêtre puis évêque dans le nouveau rite d’ordination institué par Paul VI en 1968, il y a doute sur la validité de ces ordinations, donc doute sur la validité des sacrements qu’il administre, donc doute sur la validité des saintes huiles consacrées ce Jeudi Saint. Du doute à l’affirmation d’invalidité totale, il n’ya qu’un pas : certains n’hésitent pas à dire, ou tout du moins à suggérer fortement, que le rite d’ordination de Paul VI étant considéré dans les faits comme invalide, alors les saintes huiles consacrées par Mgr Huonder sont également invalides, ce qui frapperait d’invalidité les sacrements qu’administreront ensuite les prêtres de la FSSPX avec ces saintes huiles. Ce serait une première ; et l’accusation est grave. A ces doutes successifs est ajoutée une troisième présomption, celle que Mgr Huonder serait appelé à prendre de hautes responsabilités dans la FSSPX, certains n’hésitant pas à affirmer, toujours sans preuve, que celui-ci ordonnerait à terme des prêtres et pourquoi pas des évêques, au sein de la Fraternité.
Je récapitule les griefs : trois accusations gratuites -je dis bien gratuites- et graves, présentées comme de quasi-certitudes, ébranlent la confiance des fidèles : d’abord sur les intentions et le rôle supposé de Mgr Huonder dans la Fraternité, considéré avec insistance comme le loup dans la bergerie ; ensuite sur la validité ou non des saintes huiles qu’il a consacrées ce Jeudi Saint ; et enfin sur son avenir supposé au sein de la Fraternité.
Qui annonce ça ?
Pour la plupart, des sédévacantistes et assimilés. J’insiste sur le « et assimilés » parce que beaucoup me répondront qu’ils ne sont pas sédévacantistes. Peu importe, ils sont à mettre dans le même panier, ils en ont le même mauvais esprit, la même agressivité, la même façon de présenter des présomptions comme des certitudes et de remanier la théologie selon leurs thèses en annonçant se baser sur « la » théologie alors qu’il s’agit de « leur » théologie ; et enfin, même haine à peine dissimulée envers les grandes œuvres qui font vivre la Tradition, à commencer par la FSSPX. La plupart des prêtres détracteurs et accusateurs sont d’anciens de la FSSPX ; ceci peut expliquer cela. Parmi les réactions passionnées de ceux que je compare à des chiens ayant trouvé un bon nonos à ronger, il y a l’abbé Salenave (vidéos + site web), l’abbé Rousseau (idem), l’abbé Pinaud (double page accusatrice dans Rivarol du 26 avril 2023), plusieurs sites ou associations se disant catholiques traditionalistes (en réalité sédévacs ou assimilés), et vendredi 26 mai, les éditions Saint-Rémi (ESR) qui se sont fendues d’un e-mailing particulièrement angoissant envoyé à toute leur base de données, etc… je n’ai pas cherché à recenser tout le monde. Personne, parmi tous ces gens, ne constitue une autorité légitime dûment reconnue, chacun parle en son nom propre, il faut le savoir.
Et tous ces donneurs de leçons à la parole venimeuse et in fine malveillante, s’érigent en gardiens impitoyables de la foi, et se considèrent nantis d’une mission quasi divine : sauver l’Eglise et la Tradition d’un très grand danger. Mais on peut sincèrement se demander si le plus grand danger, ce ne sont pas eux-mêmes. Est-ce vraiment rendre service à la Tradition que de semer le doute, la division, de susciter des dissensions et des discordes en agitant les cœurs ?
Obnubilés par leur obsession du rejet de la Rome conciliaire, ces hommes suivent leur pensée sans chercher à connaître ou comprendre la volonté de Dieu en ces temps de grandes tribulations ; du coup ils oublient, ou négligent, un point essentiel : nous vivons le mystère d’iniquité, notion que j’étudie en tant qu’eschatologue. Or j’ai pu observer que la théologie n’a pas réponse à tout, et qu’elle n’a pas suffisamment envisagé que les deux principales conséquences du mystère d’iniquité, à savoir l’apostasie des enfants de Dieu et la défaillance des autorités jusqu’au plus haut niveau, jusqu’à en devenir hérétiques (!) pour certains, auraient lieu dans l’Eglise même. Les Pères de l’Eglise et les théologiens s’attendaient à une Eglise réduite à la portion congrue, persécutée et entourée d’ennemis, mais pas à ce qu’elle apostasie elle-même, et encore moins le pape. Le bon grain et l’ivraie poussent dans le même champ, c’est à dire l’Eglise ; ces hommes préfèrent sortir du champ, elle est là l’erreur, car ils s’excluent de l’Eglise, d’où leur hargne envers un Mgr Lefebvre qui, divinement inspiré, avait compris qu’il fallait rester dans l’Eglise coûte que coûte mais sans participer à ses erreurs, en y constituant le bastion indépendant qui fait perdurer, envers et contre tout, la saine doctrine, la sainte liturgie et un sacerdoce non dénaturé. D’où un statut certes inconfortable parce que bancal, mais qui résout à la fois le mystère d’iniquité tel qu’il s’est réalisé et la promesse que les forces de l’enfer ne prévaudront pas contre l’Eglise de Dieu. Pour que cette promesse s’accomplisse, il fallait que la Tradition reste dans l’Eglise dont elle constitue la partie saine.
Ceci est une explication, évidemment imparfaite car le mystère d’iniquité contiendra toujours une partie obscure, mais elle se tient, et surtout contredit la pensée des sédévacantistes et assimilés, qui refusent d’envisager une telle éventualité, d’où leur hargne contre, pourtant, ce qui constitue la partie de l’Eglise non déformée, non faussée, non apostate, et non hérétique : la Tradition, à commencer par la FSSPX, seule entité qui n’a pas failli, quoiqu’on en dise, même si les hommes qui la constituent et la dirigent sont, eux faillibles, et ne trouvent pas forcément tout de suite le bon chemin. Mais Dieu veille et la protège, cessons donc d’accumuler des procès d’intention là où les événements contredisent certaines velléités présumées. Je pense notamment à ce pauvre Mgr Fellay, accusé des pires mauvaises intentions, alors que sur le terrain, il n’en a rien été. Mais beaucoup s’entêtent à prendre leurs désirs pour des réalités, même si les faits les contredisent. Heureusement, l’histoire retiendra les faits, pas des suppositions.
Prenons donc maintenant la défense de la FSSPX, et passons ces différents points en revue.
1) Sur le rôle, les intentions et la présence de Mgr Huonder au sein de la Fraternité
Pour lever toute ambiguïté, le communiqué de la Maison mère de la Fraternité du 20 mai 2019 précisait que : « Selon une volonté exprimée depuis longtemps, Mgr Huonder se retire dans une maison de la Fraternité Saint-Pie X. Le seul et unique but de cette démarche est de se consacrer à la prière et au silence, de célébrer exclusivement la messe traditionnelle, et d’œuvrer pour la Tradition, unique moyen de renouveau de l’Église. »
Bref Mgr Huonder fut présenté comme un jeune retraité n’ayant pas pour objet de prendre des responsabilités au sein de la Fraternité. C’est bien ce qui s’est passé. Il a rendu quelques services en tant que prélat dans un cadre défini à l’avance, et qui a été respecté.
Les détracteurs relèvent que depuis 2015 Mgr Huonder avait été chargé par le Vatican d’entretenir des relations avec la FSSPX, très exactement « d’entamer des discussions » ce qui est très vague, sa sensibilité au rite traditionnel y étant probablement pour beaucoup. Mais rien ne dit qu’il poursuive cette mission encore aujourd’hui, en tout cas ce n’est pas l’objet officiel de sa présence, et c’est bien ce qui se passe.
Donc les méchantes langues ne se basent que sur des suppositions, à partir de quelques mots prononcés ici et là, pas toujours heureux ni clairs certes, mais qui n’ont pas été suivis d’effet sur le terrain.
D’autre part, pour que la direction de la Fraternité accepte son intégration, il est évident qu’elle s’était assurée au préalable de la sincérité des intentions de Mgr Huonder, et notamment de son renoncement à la doctrine et à la liturgie conciliaires au profit de la seule Tradition. Ce sont les termes du communiqué, cosigné par Mgr Huonder et le Supérieur général l’abbé Pagliarani. Les accusations de loup introduit dans la bergerie soupçonnent donc la direction de la Fraternité de légèreté, d’inconséquence, voire de complicité du berger avec le loup. Cette pensée est malveillante et démentie par tous les actes de l’abbé Pagliarani, qui prouvent au contraire sa volonté de maintenir la société dans la droite ligne instituée par Mgr Lefebvre, sans aucune concession, ni doctrinale, ni liturgique avec la Rome conciliaire ; sans compter que, au vu de ses plus récentes déclarations, l’abbé Pagliarani ne se fait aucune illusion sur Bergoglio et sa mission destructrice. Le soupçonner d’accueillir de son plein gré un hypocrite missionné par Bergoglio pour investir la Fraternité de l’intérieur, relève de la médisance si ce n’est de la diffamation, mais sûrement pas de la réalité.
Ceci m’amène à un sujet connexe : la réalité de la conversion de Mgr Huonder. Si la FSSPX l’a accepté en son sein, c’est bien parce qu’elle avait constaté au préalable sa conversion à la Tradition, et qu’elle s’en était assurée, probablement plus que pour tout autre converti, vu les remous soulevés par son arrivée. On peut émettre deux remarques à ce sujet :
– Mettre en doute la réalité et la sincérité du converti est déplacé. Je suis moi-même amené régulièrement à rencontrer de nouveaux convertis à st Nicolas du Chardonnet : quel que soit leur passé, ils bénéficient d’un a priori favorable, personne ne pense à mettre en doute la sincérité de leur conversion, ni à les considérer comme des hypocrites ou des agents doubles. Sauf pour Mgr Huonder, celui-là a droit à un a priori négatif de la part de beaucoup, alors qu’étant sous le feu des projecteurs, c’est peut-être celui dont on s’est le plus assuré de la sincérité !
– Et d’autre part, s’étendre sur son passé relève de la malhonnêteté intellectuelle. On se doute bien que ce dernier est probablement lourd et chargé comme pour beaucoup de prélats conciliaires. Mais ce n’est pas ainsi que le Père réagit lorsque l’enfant prodigue revient à la maison, cependant c’est le reproche effectué par son frère aîné, l’œil mauvais et la rancune tenace. Laquelle des deux attitudes devons-nous imiter dans cette parabole ? Ainsi donc, il est inutile de faire des conférences pour détailler tout son passé conciliaire, afin de susciter le doute sur sa démarche : le simple fait de rejoindre la FSSPX -et que celle-ci l’accepte- sont des aveux du rejet de son passé conciliaire.
Et j’en viens au troisième aspect : une autre des critiques consiste à demander, si ce n’est exiger, que l’intéressé procède à une dénonciation publique et explicite de son passé. Mais depuis quand dicte-t-on à quelqu’un la façon dont il doit se convertir ? Le simple fait de rejoindre une structure comme la FSSPX est en soi une preuve publique de ce renoncement, doit-il en faire plus ? Et contenterait-il des contradicteurs qui de toute façon font les questions et les réponses ? Seraient-ils satisfaits ou exigeraient-ils encore plus ? Il y a fort à parier que la mauvaise foi de ceux-ci l’emporte sur le souhait réel de voir Mgr Huonder confirmer sa conversion.
Alors, sur ce point, il est important de savoir que la FSSPX a réagi ; depuis cette controverse, ont été publiés ce mois-ci par FSSPX News trois entretiens vidéo de Mgr Huonder, en allemand sous-titrés en français, où il explicite sa démarche. Voici les liens sur la transcription des textes des trois vidéos :
https://fsspx.news/fr/news-events/news/un-temoignage-de-mgr-huonder-la-grande-blessure-1-texte-82476
https://fsspx.news/fr/news-events/news/un-temoignage-de-mgr-huonder-la-grande-blessure-2-82492
https://fsspx.news/fr/news-events/news/un-temoignage-de-mgr-huonder-la-grande-blessure-3-82511
Chacun pourra se faire plus facilement une idée sur la démarche de Mgr Huonder, en évitant les déformations des « on dit » et autres interprétations tendancieuses.
2) Sur la validité ou non de son ordination, et, partant, de la validité des sacrements qu’il confère
Ce sujet est au centre de la controverse et de la discorde. Depuis 1968, les sédévacantistes et assimilés ont produit une vaste littérature pour tenter démontrer le caractère invalide du rite d’ordination institué par Paul VI, selon un procédé reposant à peu près sur cette idée : quand on veut tuer son chien, on l’accuse de la rage. Il est certain qu’une des principales et premières motivations de la création de la FSSPX en 1970 par Mgr Lefebvre avait pour but d’ouvrir un séminaire où l’enseignement et les rites d’ordination seraient préservés de l’esprit, de la doctrine et des dérives issus du concile Vatican II. C’est un fait, mais celui-ci diffère du jusqu’auboutisme de l’esprit sédévacantiste dans la mesure où ce qu’il fallait éviter c’était tout ce qui provenait du concile, parce que très vite douteux, alors que les rites, la doctrine et la liturgie existant jusque-là ne posaient aucun problème. Voilà pourquoi Mgr Lefebvre n’a rien ajouté, rien enlevé, il s’est contenté de poursuivre ce que faisait l’Eglise jusqu’au concile et ses réformes, c’est-à-dire jusqu’en 1962. Il n’était pas question d’invalidité des sacrements mais de doutes sur ceux-ci pour une raison précise, que Mgr Lefebvre explicitera dans le sermon qu’il prononça lors des sacres de 1988, qui sert encore de référence, et que voici : « Tous ces séminaristes qui sont ici présents, si demain le Bon Dieu me rappelle, de qui recevront-ils le sacrement de l’ordre ? Des évêques conciliaires, dont les sacrements sont tous douteux, parce que l’on ne sait pas exactement quelles sont leurs intentions ? Ce n’est pas possible. »
Voilà. En fait, les autorités compétentes n’ont jamais déclaré que le nouveau rite d’ordination de 1968 était invalide, et donc également les sacrements conférés par les prêtres ordonnés selon ce rite, mais douteux. Douteux parce que sur les trois facteurs dont dépend la validité du sacrement, le seul élément qui peut faire défaut est l’intention du ministre.
C’est le second élément de réponse fourni par la Fraternité saint Pie X dans cette controverse. En effet, dans le numéro du Courrier de Rome daté de mars 2023 (mais paru fin avril, après le début de la controverse), l’abbé Jean-Michel Gleize explique la position théologique de la Fraternité sur ce sujet, dans un article de 6 pages intitulé « Tous douteux ? ».
Il revient notamment sur les propos de Mgr Lefebvre que nous venons de citer :
« La question fondamentale qui se trouve à la racine de cette double difficulté, est celle de l’intention requise à la validité des sacrements. En effet, cette validité dépend essentiellement de trois facteurs : la matière, la forme et l’intention du ministre. Dès lors que la matière et la forme sont assurées, le seul élément qui peut encore faire défaut et rendre invalide le sacrement est l’intention du ministre. Or, seuls les deux sacrements de l’extrême-onction et de la confirmation présentent une matière douteuse, en raison du fait que Paul VI a rompu une tradition pourtant bimillénaire, autorisant l’utilisation d’une huile autre que l’huile d’olive. »
Il ajoute :
« Il est de foi divine et catholique définie qu’une intention du ministre est requise à la validité des sacrements. »
Il n’est pas nécessaire de développer plus et de partir dans des controverses sans fin et stériles sur la validité ou non du rite réformé par Paul VI, heureusement les plus honnêtes des détracteurs reconnaissent que l’enjeu se situe principalement sur cette fameuse intention.
Or comment peut-on douter de l’intention de Mgr Huonder dans cette consécration de saintes huiles, puisque l’on sait que les autorités de la Fraternité ont validé sa conversion ? Et ont validé ce choix de célébrer une messe chrismale ?
En effet l’abbé Rousseau, un des détracteurs, nous apprend que « l’abbé Pagliarani, dans la lettre aux Supérieurs de la Fraternité (6 avril 2023) a annoncé le ministère épiscopal de Mgr Huonder pour le Jeudi saint : « Monsieur le Supérieur général a jugé convenable d’inviter Mgr Huonder à célébrer la première fois une messe chrismale, au séminaire de Zaitzkofen. Ce sont donc quatre messes chrismales qui seront célébrées cette année dans nos séminaires : à Dillwyn par Mgr de Galarreta, à Ecône par Mgr Fellay, et à La Reja par Mgr Tissier de Mallerais. »
Donc si l’abbé Pagliarani a jugé convenable que Mgr Huonder célèbre une messe chrismale, c’est bien parce qu’il savait qu’elle serait valide et qu’il n’en doutait pas !
Là encore, pour que les arguments d’en face soient valables, il faudrait considérer l’abbé Pagliarani comme un traître, ou un inconscient, ce qui reste à prouver dans les deux cas.
Mais que peut-on rétorquer à des fous furieux lorsqu’ils écrivent : » L’enseignement de l’Eglise est formel, les sacrements douteux doivent être considérés en pratique comme invalides. » (selon ESR) ? Ce sont des menteurs et des manipulateurs parce que lorsqu’on est sûr de l’intention, le doute sur l’invalidité saute.
C’est à cause de ce doute, et par précaution (je souligne) que la Fraternité saint Pie X réordonne les prêtres consacrés selon le rite de Paul VI. Ah, ce fameux principe de précaution, que ne fait-il pas faire aux hommes ? On l’a bien vu au moment du Covid, exemple frappant des excès du principe de précaution. C’est pour éviter toute ambiguïté, et reproche, que la FSSPX réordonne les prêtres, par précaution et non pas par nécessité absolue. Fallait-il donc réordonner Mgr Huonder, comme certains le réclament, avant de célébrer cette messe chrismale ?
Réordonner un évêque sans autorisation préalable de Rome reviendrait à revenir à une situation similaire à celle des sacres de 1988 ; qui fut un drame dans la Tradition. Avant d’en arriver là, ne peut-on pas estimer que la direction de la Fraternité a très certainement évalué le risque lié à la validité ou non de l’ordination de Mgr Huonder, d’où le mot révélateur du Supérieur général : convenable, ce qui veut dire qu’il a obtenu au préalable suffisamment de garanties sur la validité de l’ordination de Mgr Huonder, autant en tant que prêtre qu’évêque. Doivent-ils toujours justifier leurs décisions ? On l’a vu, la question de la validité de ses ordinations se situent à deux niveaux : la validité elle-même de ceux qui l’ont consacré (or, vu son âge, il est très probable qu’il ait été ordonné par des évêques eux-mêmes sacrés selon le rite traditionnel, donc ce doute est levé), et l’intention de ceux-ci : mais a-t-on déjà vu un évêque ordonner des séminaristes sans avoir l’intention d’en faire des prêtres ? Ça n’a pas de sens. Sur de tels sujets, on doit accorder un minimum de confiance aux autorités compétentes, en l’occurrence à la direction de la Fraternité saint Pie X.
3) Sur son avenir au sein de la FSSPX
Sur ce sujet, nous assistons à de véritables procès d’intention, mais quoi de plus normal chez des gens qui le considèrent depuis 2019 comme le loup dans la bergerie et qui ne changeront pas d’avis, quitte à travestir la vérité selon leurs vues. À ce stade, c’est de l’acharnement couplé à un aveuglement progressif. Enfermés dans leur raisonnement, auto-persuadés du bien-fondé de leur pensée, de leurs analyses et de leur théologie, ces gens-là prennent leurs désirs pour des réalités et l’expriment comme tel.
Ainsi donc, bien qu’aucun élément ne vienne présumer de cette possibilité, ils n’hésitent pas à écrire qu’une des étapes suivantes sera de voir Mgr Huonder procéder à des ordinations sacerdotales au sein de la FSSPX ; il est vrai qu’il l’a déjà fait, en 2018 pour le compte de la Fraternité Saint-Pierre, ce qui prouve que son retour vers la Tradition ne date pas d’hier et correspond à un véritable chemin intérieur. Et pourquoi pas consacrer des évêques ?
Tout le monde aura compris que les détracteurs de la FSSPX insinuent qu’il peut exister une réelle incertitude sur la validité de ces futures ordinations. Ordinations invalides = prêtres invalides = sacrements invalides = une FSSPX ne valant pas mieux que la Rome conciliaire. Doit-on préciser qu’il s’agit là d’une mentalité typiquement sédévacantiste, je dirai même plus : c’est leur fantasme principal. Sauf que ce fantasme est basé sur un prérequis faux : l’invalidité supposée du rite d’ordination de Paul VI, et/ou celle liée à l’intention du ministre officiant. Objections auxquelles nous avons déjà répondu. Mais hélas, pour impressionner les esprits et donner du corps à leur argumentation, certains n’hésitent pas à écrire (le sédévacantiste enragé chez ESR) que « l’implication de l’évêque douteux Vitus Huonder dans les futures ordinations et futurs sacres de la FSSPX, a été annoncée le 18 avril 2023 en visio-conférence aux responsables de la FSSPX par l’abbé Pagliarani. »
Je ne sais pas où il a trouvé ça, personnellement je n’en sais rien, mais permettez-moi de douter de ce douteur professionnel, habitué aux affirmations péremptoires, gratuites, sans preuves, biaisées et déformées.
C’est une fois de plus faire injure à la direction de la FSSPX, les prendre pour des imbéciles ou des traîtres, comme s’ils n’étaient pas capables de repérer le petit jeu de Mgr Huonder, à supposer qu’il y en ait un, et comme s’ils ne prenaient pas la précaution de s’assurer de la validité des ordinations de leurs collaborateurs, surtout à ce niveau. Et comme s’ils n’entendaient pas les mises en garde des détracteurs sédévacs comme des propres membres de la FSSPX car tout le monde n’est pas pro-Huonder, ou peu s’en faut.Ceci porte un nom : mettre la charrue avant les bœufs, affirmer sans preuve, présumer des intentions sans les connaître, autrement dit diffamer, calomnier, tromper les honnêtes gens, déformer, fausser la réalité, bref agir comme ceux qu’ils ont en horreur : les conciliaires.
Un dernier mot : que valent tous ces détracteurs eux-mêmes ? Quelle autorité légitime ont-ils pour intervenir de cette façon ? Ne sont-ils pas, pour la plupart, des prêtres isolés, ou des laïcs en rupture de ban avec l’Eglise et souvent avec les sacrements ? Des prêtres pour certains coupés de l’Eglise, schismatiques, ayant formé leur propre petite communauté ? Eux qui se présentent comme voulant sauver les traditionalistes d’un grand danger, sont-ils conscients que leur façon d’agir a toujours été formellement interdite par l’Eglise de toujours dont ils se réclament, qu’elle n’a jamais toléré, accepté, autorisé ces espèces de corps francs indépendants de toute autorité et de toute juridiction ?
Vivre en dehors d’elle et presque s’auto-proclamer l’Eglise à eux tous seuls ?
Je terminerai ce chapitre sur une interrogation, je lance une idée, une éventualité possible : puisqu’il est difficile d’envisager une nouvelle série d’ordination d’évêques au sein de la FSSPX sans risquer un clash avec Rome, pourquoi la stratégie -ou une des stratégies, en attendant mieux- ne serait-elle pas de recruter des évêques déjà ordonnés, en les convertissant à la Tradition ? Cela résoudrait en partie le problème de la succession des évêques actuels et expliquerait la possible montée en puissance de Mgr Huonder après une phase d’observation.
J’avance cette hypothèse sans savoir si c’est une piste retenue par la Fraternité, en tout cas elle est plausible, dans la mesure où au moins quatre conditions sont réunies : faire confiance aux autorités de la FSSPX, et pour elles, s’assurer de la validité des ordinations de ces évêques (on l’a vu, c’est faisable, même selon le rite de Paul VI), s’assurer de la sincérité de leurs conversions, et bien entendu, conserver cette stratégie secrète, surtout ne pas l’éventer, sinon Rome mettrait une pression folle sur tous les évêques de la terre.
Cette hypothèse serait un élément de réponse sur le silence de la FSSPX sur cette affaire, même si on préfèrerait qu’elle lève l’ambiguïté en expliquant clairement ses intentions avec Mgr Huonder par un communiqué officiel.
Conclusion
N’en déplaise aux détracteurs de tous poils et à leurs affirmations gratuites, déformantes et biaisées, la controverse Huonder est sur-exagérée, surdimensionnée et surexploitée. Les sauveurs auto-proclamés de l’Eglise et de la Tradition sèment le doute et la zizanie en manipulant les esprits.
Non, le rite d’ordination de 1968 n’est pas invalide même s’il est douteux à cause de l’intention, mais le doute est levé une fois l’intention connue et validée.
Non, la messe chrismale de Mgr Huonder n’est pas invalide, il n’y a pas d’inquiétude à avoir à ce sujet.
Non, la direction de la FSSPX n’est constituée ni d’écervelés, ni d’aveugles, ni de traîtres ou de complices de Rome, mais au contraire d’hommes remarquablement sages, réfléchis, clairvoyants et prudents, parfaitement lucides sur la situation de l’Eglise et sur la personnalité et la mission destructrice du « pape » actuel.
Non, Dieu n’a pas donné tout pouvoir au diable : il l’a autorisé à détruire son Eglise (dialogue de Léon XIII du 13 octobre 1884), d’où son apostasie manifeste, sauf dans la Tradition, mais pas à détruire la Présence divine sur terre, autrement dit le démon peut s’attaquer aux hommes, manipuler les esprits, déformer, fausser, désacraliser la doctrine et la liturgie, détourner les hommes de Dieu, mais pas invalider les sacrements, auquel cas ce serait donner au démon une puissance sur Dieu qu’il ne peut pas avoir, du moins pas au début, pas si tôt. Et rien ne dit qu’il l’aura un jour.
Oui, le mystère d’iniquité est à l’œuvre, toute la terre, toute la chrétienté lui sont soumises et ploient sous la misère, il nous dépasse et nous force à l’humilité et à la confiance en Dieu, ce que Mgr Lefebvre et ses successeurs ont compris et ont accepté, malgré les incertitudes que ça entraîne (et le courage que ça nécessite !), tandis que leurs détracteurs, ceux que j’appelle les sédévacantistes et assimilés, se révoltent contre ce mystère, refusent de l’admettre, et sèment la division et la discorde. Qu’ils se méfient, à force de jouer le jeu du fils de perdition, on finit par être entraîné avec lui.
Louis d’Alencourt, le 30 mai 2023 en la fête de sainte Jeanne d’Arc
Photo : Mgr Vitus Huonder célébrant la messe traditionnelle (doc FSSPX News)
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